Et pourtant, après ces drames, nous aurions aimé entendre de la part de ceux qui prétendent être l’opposition, un discours solennel, le discours fondateur d’une nouvelle ère, un souffle puissant. Nous avons été gratifiés de pipi de chat (1), ou, pour être plus délicats, du « bruit d’un écoulement d’eau de pluie à travers une canalisation vétuste ».
Nous attendions les mots suivants, car s’il y a une repentance à faire, c’est celle due aux Français :
Chers concitoyens, ou mieux chers compatriotes, nous devons vous avouer que nous nous sommes trompés, comme se trompent, aujourd’hui encore, ceux qui nous gouvernent… mais ceci n’est pas une excuse.
Pour ne prendre aucun risque électoral, pour assurer la pérennité d’un pouvoir dérisoire, pour justifier notre inertie, nous avons « inventé toute sorte d’alibis : l’universalisme de nos valeurs, l’exception culturelle » et, sans craindre de nous contredire, « l’immigration une chance pour la France », la « société multiculturelle ». Nous avons détourné le sens des mots, nous avons utilisé des métaphores, nous nous sommes livrés à tous les dénis. Aveugles, nous avons conduit des aveugles, dans le silence et la déformation des faits par la presse écrite et parlée.
Certes, nous ne le souhaitions pas, mais par lâcheté, nous avons laissé les familles se déliter, les éducateurs insultés, les pouvoirs de la république bafoués, les insultes se multiplier dans des raps orduriers…
Nous avons cru, et nous vous avons laissé croire, que la crise économique, pourtant contingente, était le principal danger pour le pays, alors que notre civilisation était en train de s’affadir et de disparaître définitivement, la politique étrangère sinueuse faite par nos excellences depuis 50 ans y contribuant pour une large part.
Ainsi, des milliers de harkis ont été humiliés, sacrifiés en 1962 (comment voudrions-nous ensuite que leurs enfants se sentent Français ?) ; 5.000 de nos nationaux assassinés à Oran le 5 juillet 1962, notre armée gardant l’arme au pied, afin d’inaugurer notre nouvelle politique algérienne (comment croire aux garanties des traités signés par la France ?) ; le discours de Phnom Penh de septembre 1966 pour célébrer le « modèle d'unité et d'indépendance » du Cambodge et s’accorder de fait au parti communiste français (était-ce là, la clairvoyance de nos icones politiques ?) ; le discours provocateur visant le « peuple dominateur et sûr de lui-même », annonciateur d’une renaissance de l’antisémitisme et des assassinats d’aujourd’hui… et « toutes les choses que nous ne nous sommes pas dites ».
La « soumission » raisonnée, n’est-elle que le songe prémonitoire d‘un romancier ? Il en va différemment de la réalité de ces trois jours de drame qui auraient pu inspirer un grand souffle à l’opposition. Mais elle préfère ménager le confort de ses dirigeants et croit préserver leurs chances de retour. « A jouir sans péril, on s’essouffle sans gloire ». Tant pis pour l’opposition… mais tant pis pour nous !
1- Selon le Point du 16 janvier 2015, à M. Roger Karouchi, sénateur qui menaçait de quitter l’UMP, « ce parti de pleutres », le président du parti, Nicolas Sarkozy, a répondu : « N’attends pas que je sois un petit politicien. Notre premier devoir est de nous taire »
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