Avocat au barreau de Paris, Gérald Pandelon est docteur en droit privé-sciences criminelles et docteur en science politique, diplômé de Science-Po. Chargé d’enseignement, auteur de plusieurs ouvrages, il est également membre du Bureau Politique de La Droite Libre. Très connaisseur des milieux délinquants, y étant en contact permanent pour son métier, il répond à un interview d’Atlantico du 7 août sur les événements habituels des banlieues (dont la bagarre d’Orly entre rappeurs est un épiphénomène).
Atlantico: selon un article paru dans le JDD, 117 bagarres entre bandes ont été répertoriées à Paris en 2017. 46 bandes seraient suivies par les services de polices, recouvrant 879 personnes. Ces bagarres ne semblent pas avoir de causes précises à l’exception de revendications territoriales, ce qui met en avant une volonté de recherche de la violence pour la violence elle-même. Comment lutter efficacement contre de telles dérives ?
Gérald Pandelon : Ce qui me préoccupe, c’est le fait que, dans certains endroits de la société, la violence devienne un mode d’expression qui prend le pas sur un certain nombre de limites que, dans une société civilisée, on s’accorde à respecter. Par exemple, on note que dans les banlieues, la violence se manifeste par des rixes entre bandes et des combats. Parfois même, cette ultra-violence s’exporte dans des aéroports et peut concerner des rappeurs en concurrence davantage d’Ego que de territoires à conquérir. Mais les vols et les agressions physiques sont également de plus en plus nombreux. Selon l’AFP, les vols violents à Paris augmentent, surtout dans les transports en communs. Selon le parisien, plus de 9000 agressions pour vol sont régulièrement recensés contre 6 821 à la même époque il y a 10 années, soit une augmentation de 39,3%. Avec 50,3% des vols, Paris est le principal lieu de ces agressions, 27,4% ayant eu lieu dans la petite couronne (Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis, Val-de-Marne) et 22,3% dans les départements de la grande couronne (Val-d’Oise, Yvelines, Essonne et Seine-et-Marne). Plus préoccupant encore, cette violence est de plus en plus décrite comme gratuite, c’est dire sans revendications territoriales précises, contrairement aux justifications qui sont souvent apportées, comme des leitmotiv par les auteurs desdites violences lors de leurs interpellations, souvent en flagrance, et leur placement en garde à vue. Les explications fournies par les mis en cause sont sempiternellement les mêmes. Il s’agirait essentiellement d’ambitions trop présentes et pressantes de voisins ne respectant pas les règles. Mais, à l’épreuve des faits, cette violence est de moins en moins motivée par quelque ambition, de quelque nature que ce soit. Elle est donc une pure tautologie, une violence pour la violence. D’ailleurs, les auteurs de cette violence post-moderne ne respectent plus grand-chose à partir du moment où ils l’orientent aisément contre les membres de leur propre famille (la mère, le père, la sœur, etc.) ou encore des institutions constitutives du lieu de résidence. A telle enseigne qu’elle est non seulement brutale, absurde et dénuée de finalité, ce qui constitue un changement radical dans les motivations qui présidaient antérieurement au passage à l’acte, lequel était peu ou prou toujours causé. Car auparavant, et pour le dire encore plus simplement, on ne frappait pas sans motifs, on ne cassait pas sans motifs, qu’ils soient justifiés ou non, le passage à l’acte reposait toujours sur une raison d’ordre idéologique et/ou politique. L’exercice de la violence avait, en d’autres termes, un fondement, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui, et c’est en cela que la violence aujourd’hui a muté. C’est ainsi qu’il est inexact de considérer, comme la plupart des sociologues manifestement en mal de réflexion (ils répètent toujours la même chose avec plus ou moins de bonheur), que cette violence puisse être interprétée comme une réaction des jeunes face à l’exclusion. Car, en réalité, non seulement elle se manifeste par une grande diversité de formes : Razzia dans les commerces, rodéo de voitures volées, racket, rixes entre bandes, provocation et injures verbales ou gestuelles contre les adultes du voisinage et les agents des institutions, agressions physiques, trafics divers ( dont la drogue ), saccages et pillages ; mais également, sur le fond, elle incorpore le plaisir dans l’étiologie criminelle, donc l’acte gratuit. La police a pu mettre en place, en 2010, un plan de riposte spécifique à ces violences entre bandes. Comment évaluer l’action de ce plan de riposte ? Quels en sont les manques ?La police, en France, effectue un travail remarquable ; la difficulté c’est qu’elle est dépassée en raison, à mon sens, d’une hiérarchie souvent frileuse. En effet, si nos forces d’élite avaient véritablement les coudées franches pour ramener l’ordre, elles le feraient. Mais ce n’est pas possible. C’est d’ailleurs le motif essentiel pour lequel, nous sommes contraints, de Paris à Marseille, mais pas uniquement, de se cantonner à des mesurettes. Car, une fois n’est pas coutume, essayons de regarder la réalité en face, cette réalité qui déplaît souverainement à nos politiques, toutes tendances confondues, mais encore davantage à gauche, et qui fait parfois irruption de façon brutale dans des affaires de terrorisme, quand en France, du Bataclan parisien à Nice, sur la tristement célèbre promenade des Anglais, coule le sang, le sang d’innocents. Cette réalité violente qui devient la marque la plus évidente des théories niaises et fallacieuses d’une certaine gauche bien-pensante, haineuse de la vérité, laquelle, malheureusement, n’en arrive à douter de ses propres théories (et encore…), que lorsque l’évidence absolue, vue et vécue, lui apporte la preuve irréfutable de son ineptie. Pourtant, en France, ce qui est communément admis comme une « zone de non-droit », un espace où plus personne ne peut pénétrer sauf les caïds, fait l’objet d’une classification bien précise, à 4 niveaux. Un premier niveau 1, les QSN (QUARTIERS SENSIBLES DE NON-DROIT): Quartiers où règnent les bandes et la délinquance avec des faits de violences urbaines, fusillades ou règlements de comptes et trafic en tout genre. Ce sont les quartiers les plus chauds de France considérées comme des zones de non droit ; un niveau 2 ou QSTD (QUARTIERS SENSIBLES TRÈS DIFFICILES): des faits de délinquance réguliers et de toute sortes. La plupart de ces quartiers ont été auparavant des zones de non droit. ; un 3 ème niveau, les QSD (QUARTIERS SENSIBLES DIFFICILES): des faits de délinquance assez réguliers, trafic de drogue et toutes sortent de trafics, des nuits de violences urbaines qui peuvent arriver à la suite d’une petite tension. Enfin, un niveau 4 constitué par les QSP (QUARTIERS SENSIBLES PROBLEMATIQUES): petite délinquance qui peut être régulières et qui peut exploser a certains moments mais généralement ces quartiers sont calmes et font parler d’eux de temps à autres et posent quelques soucis a la ville mais ne sont pas considérés comme chauds. Et, parmi les QSN, sortes de jungles urbaines, sont répertoriés depuis plusieurs années les mêmes cités, dont nous entendons parler, alternativement chaque semaine, à longueur d’années. Ce sont d’abord les fameux quartiers Nord de Marseille (13), puis le Val Fourre (78), mais encore la Grande Borne (91) ou Le Mirail (31), sans oublier Clichy / Montfermeil (93) et Les Minguettes (69). Or, ce qui apparaît comme extraordinairement étonnant c’est le discours toujours édulcoré de nos édiles lorsqu’il s’agit d’évoquer lesdites cités. En même temps on les comprend. Car reconnaître la réalité à la hauteur de ce qu’elle est véritablement conduirait inéluctablement, du même coup, à ce que fut implicitement reconnu par les mêmes acteurs politiques leur immense incompétence à résoudre les vrais problèmes qui se posent à notre pays, en termes d’intégration, d’insécurité, d’échec total du modèle républicain, de crise de l’Etat, d’immigration incontrôlée, cause essentielle desdits maux, même si, à l’évidence, nous n’opérons aucune confusion entre la grande majorité des français d’origine qui se sont parfaitement intégrés et ces sauvageons qui ne sont mus que par la haine. Ce qui est curieux c’est toutefois que les manques soient connus depuis des lustres en termes d’effectifs, donc de moyens, pourtant rien ne change et rien ne risque de changer, je crois même que les choses vont empirer. Car ce sont nos mentalités, trop dociles face à des personnes qui ont fait de la violence leur unique mode d’expression qu’il conviendrait, en urgence désormais, de modifier en profondeur, ce que nous appelons notre « logiciel », c’est dire une disposition de l’esprit propre à notre pays qui nous pousse constamment à ne pas vouloir accepter de dire ce qui est, à ne pas vouloir admettre ce qui est, bref à fuir nos responsabilités, par conformisme, égoïsme ou tout simplement par lâcheté. Et cette disposition de l’esprit, manifestement privé d’Esprit, ne concerne pas uniquement cet épineux problème, mais innerve également d’autres sujets ô combien essentiels, au premier rang desquels la question de la pression fiscale confiscatoire dans notre pays. Car subsiste encore une ironie doublée d’une illusion, celle de nous faire croire, comme un réflexe mental, que nous vivrions encore dans une République une et indivisible… Si les bandes semblent avoir toujours existé, quelles en sont les spécificités actuelles ?Trois caractéristiques définissent ces bandes particulièrement actives dans l’Est parisien. Leurs effectifs sont d’abord jeunes si l’on admet que la plupart des membres n’ont pas vingt ans, d’autre part, très violentes car lourdement armés, enfin, ne disposant d’aucune morale, car elles peuvent s’en prendre à n’importe qui, c’est dire également à des personnes très âgées, sans aucun ménagement. Leur seul but est l’intérêt recherché, tels des prédateurs avides. En réalité, le critère essentiel pour ses bandes, avant de se livrer à leurs exactions, c’est la particulière vulnérabilité de leurs proies, qu’elles soient des touristes peu enclines à se méfier de notre violence hexagonale ordinaire, que ce soient comme indiqué de personnes âgées, ou d’individus demeurant effectivement dans leurs quartiers dont elles connaissent les habitudes. Par conséquent, ce type de délinquance juvénile ne peut inspirer que le plus profond mépris ; et, lorsque des avocats les défendent, ils ne font qu’exercer leur métier, un métier qui est par essence schizophrénique. Enfin, ce qui apparaît comme inquiétant c’est effectivement l’aggravation du phénomène, à telle enseigne qu’en l’absence d’une forte répression (puisque la prévention ne sert à rien et ne suscite que l’hilarité de ces jeunes), ces bandes vont se multiplier car n’en déplaise aux donneurs de leçons en chefs du parti du Bien, elles se nourrissent également de l’apport des récentes vagues de migrants qui, pour dramatiques que soient leurs situations individuelles, viennent grossir leurs rangs. Je crois sincèrement qu’il n’y a pas de réelle volonté publique politique à enrayer cette délinquance-là, par peur d’un embrasement encore plus important de ces cités sensibles, par absence de courage, par crainte surtout de se voir opposer la plupart des associations de défense des droits de l’homme, lesquelles, en définitive, préféreront toujours un délinquant à un représentant des forces de l’ordre. |
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