Passons sur les ridicules, ou plutôt scandaleuses, réactions des marchés financiers. Ils font s’évaporer la valeur d’entreprises parfaitement saines et prometteuses uniquement parce que Messieurs les brokers ne sont pas contents. Ça ne durera pas : ces sordides manipulateurs de cours s’empresseront de ramasser à prix soldé les valeurs dont ils ont provoqué la chute.
La sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne est la meilleure nouvelle qui soit parvenue à l’Europe depuis la chute du communisme il y a déjà vingt-sept ans. Réfractaires au projet des pères fondateurs du projet européen en 1950, les Britanniques n’ont accepté d’y entrer en 1973 que parce qu’ils craignaient de se faire marginaliser par ce qui était un succès retentissant à l’époque. L’Europe des Six (Allemagne, France, Italie, Benelux) était saisie par l’expansion et avançait, cahin-caha, sur la voie d’une forme de confédération, riche des attributs qui vont avec : une politique étrangère et une défense communes dans un espace sans frontières, tout le reste étant de la responsabilité de chacune des nations souveraines. Les États-Unis d’Europe se feraient, ou ne se feraient pas, en fonction des décisions des peuples qui composaient l’Union.
Winston Churchill, lui-même, s’était prononcé pour les États-Unis d’Europe à condition que le Royaume-Uni n’en fût pas. Le Général de Gaulle pensait exactement la même chose. Le malheur est que, dès qu’il a eu le dos tourné, on s’est empressé d’oublier l’avis des deux vieux compagnons d’armes. Le Royaume-Uni entra dans la Communauté européenne pour y faire des affaires, et, sinon la détruire, en tout cas pour la modeler à sa façon, alors que ceux qui l’accueillaient, croyaient encore à l’union.
Les artisans de l’entrée du loup dans la bergerie se sont certainement crus plus féroces que le loup. Ils ne furent que de tendres agneaux prêts à tout accepter pourvu, non pas qu’on sauve l’Union européenne, mais qu’on continue à essayer de faire croire qu’elle existait encore. Il y a encore tout juste quelques semaines, l’Union européenne n’a pas été capable de renvoyer David Cameron dans les cordes en lui disant que ses exigences, notamment celle d’avoir un droit de regard sur la monnaie unique dont il ne veut pas, étaient exorbitantes. On a capitulé et, malgré cela, David Cameron a perdu.
L’Europe saura-t-elle en tirer profit pour reprendre la main et le chemin des pères fondateurs autour d’un nouveau projet avec ceux qui sont réellement animés d’une volonté européenne ? Pour cela, l’Europe a besoin d’hommes d’État. De dirigeants aptes à dire à Erdogan qu’il dirige un pays d’Asie musulman, non compatible avec l’Europe. Aptes à dire aux profiteurs grecs et autres, qu’ils restent toujours les bienvenus à condition de respecter les règles. À dire à la Pologne que la Russie n’est pas l’Union soviétique et que l’Union européenne n’est pas l’Otan. À l’Otan que la Turquie, étant donné ses prises de position, n’a plus grand-chose à y faire. Aux États-Unis, que si l’Otan reste dirigée contre une Union soviétique qui n’existe plus, les États de l’Union européenne qui en sont membres, devraient en sortir. À Jean-Claude Juncker, de cesser de faire son Brejnev du XXIe siècle et que les États de l’Union sont, que ça lui plaise ou non, des États souverains. À Chypre, île asiatique, que si elle garde son mur en plein milieu de sa capitale, ce n’est pas elle qui sortira, c’est l’Europe qui la mettra dehors, etc.
Y a-t-il des dirigeants européens aptes à tenir ce discours ? Pas en France. En tout cas, pas pour l’instant.
Partagez avec vos amis