Sectarisme, fourberie, incompétence ont engendré l’épouvante qui s’est emparé de Valls. Il essaie de la dissimuler derrière ce qu’il maîtrise le mieux, la hâblerie. Face au désastre qui fera regretter au PS son résultat des municipales de 2014, le Premier ministre déploie l’énergie du désespoir dans un tour de France anti-FN qui prend de plus en plus la tournure envisagée en 1953 par Berthold Brecht : le peuple vote mal, il faut dissoudre le peuple. C’est son seul programme.
Demande-t-on à un candidat aux cantonales, ou plutôt à un binôme, comment il entend exercer son mandat futur, il est incapable de parler d’autre chose que du Front national. Le pire est que, contrairement à Valls, le malheureux a des circonstances plus qu’atténuantes.
Car Hollande a tout fait pour qu’on en arrive là !
Nicolas Sarkozy avait fait voter la loi instaurant le conseiller territorial. Un texte, peut-être imparfait, mais qui avait le mérite de réduire le nombre d’élus locaux et engageait une étape décisive dans la simplification des structures administratives du pays. Selon un calendrier parfaitement maîtrisé et cohérent.
Les conseillers régionaux de 2010 avaient été élus pour quatre ans jusqu’en 2014. Avant la réforme, la moitié des conseillers généraux, ceux élus en 2008, devaient achever normalement leur mandat de six ans également en 2014. Quant à l’autre moitié des conseillers généraux, ceux de 2011, ils avaient été élus pour trois ans seulement, toujours jusqu’en 2014.
Il y a un an, les Français devaient voter, comme ils le faisaient traditionnellement depuis les années 1980, simultanément pour les conseils municipaux et… le nouveau conseiller territorial. Celui-ci devait être élu dans les cantons au scrutin uninominal à deux tours pour siéger à la fois au conseil général et au conseil régional. Les élections régionales, disparaissaient, emportant avec elles près de 1 800 élus. Le défaut de cette réforme était qu’elle n’abrogeait pas d’échelon administratif. Mais elle devait s’approfondir, la suppression des conseillers spécifiques à chaque assemblée étant un pas vers la disparition de l’une des deux.
Par sectarisme, sitôt arrivé au pouvoir, Hollande a tout cassé. Par fourberie, il a prétendu proposer une vraie simplification. Par incompétence, il a redessiné une carte des régions au mépris de toute l’histoire de France. On n’est pas loin de la forfaiture. Le résultat en est que les 1 800 conseillers régionaux sont toujours là et que les conseillers généraux, rebaptisés départementaux, sont une bonne centaine de plus. Le tout sous prétexte de simplification.
Le pire est à venir. Et c’est là que les candidats qui ne savent pas répondre autre chose que la lutte contre le Front national ont des circonstances atténuantes. Parce que, comme Christophe Colomb qui ne savait pas où il allait ni où il était arrivé, les malheureux ne savent pas ce qu’ils vont faire. Parce qu’il eût été trop simple d’abroger la loi précédente. Toujours par fourberie, on a fait semblant de modifier les compétences des conseils départementaux et régionaux. Sauf que les élections arrivent sans que ces compétences ne soient délimitées. Pourquoi ? Parce que, toujours par fourberie, Hollande, Valls et consorts qui avaient déjà reporté les élections d’un an pour casser le travail de Sarkozy, ne pouvaient plus les reporter encore une fois, le temps d’achever leur entreprise de démolition.
Mais comme, entretemps, ils voulaient casser la carte de France pour l’adapter aux impératifs immédiats de leurs grands féodaux qui avaient peur pour leur mandat, ils ne pouvaient plus organiser les élections régionales en même temps que les cantonales de ce mois-ci. Grand seigneur, le Conseil constitutionnel a condescendu à les laisser tripoter encore une fois le calendrier électoral mais, de neuf mois seulement.
Résumons : on casse une réforme cohérente qui supprimait 1 800 élus ; on redécoupe des cantons dont les limites remontent à Louis XVI ; on invente un mode de scrutin abracadabrant pour satisfaire au principe aussi ridicule que nuisible de la parité ; on augmente le nombre d’élus parce que lorsqu’on divise les cantons par deux, ça ne tombe pas toujours juste ; on reporte les élections parce qu’il faut le temps de réaliser toutes ces manipulations ; comme on est obligé de trouver un alibi à toute cette tambouille, on fait semblant de simplifier. En quoi faisant ? en regroupant des régions qui n’ont rien à voir les unes avec les autres. C’est ainsi que, sitôt franchies les limites orientales de l’Île-de-France, on se trouve en Alsace. Beau résultat !
Le plus magnifique sera le grand éclat de rire qui saisira tous les Français de bon sens au soir du 22 mars. Parce que ce sera encore plus drôle que la campagne présidentielle de 1965, lorsque Pierre Dac, fondateur du Mouvement ondulatoire unifié (MOU), faisait campagne sur le thème « Les temps sont durs, votez mou ! » et affirmait qu’en aucun cas l’Assemblée nationale ne pouvait être dissoute dans l’acide sulfurique. D’abord parce que c’est uniquement par leurs combines que les socialistes vont engranger trois gamelles monumentales en vingt-et-un mois là où ils étaient destinés à n’en prendre qu’une seule il y a un an. Ensuite, parce que Valls qui, lui, n’a rigoureusement aucune circonstance atténuante, va devoir rendre des comptes aux militants et aux élus qui lui reprocheront le score faramineux du Front national.
Ils comprendront très bien, en effet, l’objectif poursuivi par le Premier ministre. À coups d’intimidations, d’enflure verbale, d’injures, il exaspère les électeurs dans l’unique dessein de les faire migrer dès le premier tour de l’UMP vers le Front national. Le seul moyen qu’il a trouvé de sauver ce qui peut l’être est de jouer la deuxième place qualificative au détriment de l’UMP dans le maximum de cantons possibles. Son raisonnement est simple : peu lui importe que le FN soit à 35 ou à 40 %. À un PS à 20 % et une UMP à 25, il préférera un PS à 15 ou 16 pourvu que l’UMP soit à 14. La politique de la terre brûlée pour tenter de corriger la dernière crapulerie socialiste avant ces élections : c’est le PS qui avait relevé le seuil qualificatif pour le second tour de 10 à 12,5 % des inscrits… pour éliminer le FN, évidemment. C’est vraiment plus rigolo que Pierre Dac.
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Scouac
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Réponse : pourquoi l’UMP s’entête-elle alors à ne pas négocier des alliances avec le Front National au détriment du PS ?
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Tarick Dali
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C’est une tout autre question et elle n’a rien à voir avec ce sujet. Elle peut se poser au soir du premier tour pour les duels entre le PS et le FN. Dans ce cas, il est évident qu’il ne saurait être question pour nous d’appeler à voter pour le PS. Mais doit-on, pour autant, le faire en faveur du FN ? Il y a quelques années, lorsque le FN était un parti de droite, et surtout que l’UMP était infiniment plus puissante que lui, on aurait pu effectivement, envisager des accords de désistement réciproques pour faire barrage à la gauche. Aujourd’hui, le FN n’a plus rien d’un parti de droite et, surtout, il veut tuer l’UMP pour prendre sa place.
Personnellement, je pense que le FN est largement outillé pour prendre la place du PS qui peut et doit disparaître. C’est ce qui est arrivé en Pologne ou en Hongrie, par exemple, où les socialistes ont disparu. Faut-il lui donner un coup de main ? Je crains qu’il ne soit trop tard. Ou, si l’on est optimiste, trop tôt.
Trop tard, parce qu’il fallait le faire quand l’UMP était en position de force et, je le répète lorsque le FN était à droite. Trop tôt parce qu’il faut d’abord que l’UMP reprenne des forces et sache où elle habite. Or, vous aurez remarqué que les forces centrifuges sont à l’oeuvre et que l’état-major du parti continue à tirer beaucoup trop à gauche.
En tout état de cause, l’UMP devrait largement rafler la mise pour ces élections départementales. Et que, dans les cantons qui ne seront pas si nombreux que ça, où les électeurs n’auront d’autres choix qu’entre le PS et le FN, ils sont assez grands pour savoir ce qu’ils ont à faire. L’UMP n’est, de toute façon pas là, pour servir de roue de secours aux socialistes en perdition.
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