L’UMP, à en croire les media, serait embarrassée par le tournant social-démocrate prétendument emprunté par Hollande. Ce genre de commentaires est surtout destiné à mettre en valeur les talents de manipulateur du premier secrétaire à vie du parti socialiste. Naturellement, quelques bons esprits à l’intérieur de notre formation politique, plus soucieux de complaire aux commentateurs de Canal + que de préparer l’avenir de la France, jugeront que Hollande a emprunté un chemin qu’il serait dommage de ne pas suivre.
Non ! il ne s’agit pas ici de vanter les mérites d’une opposition bornée incapable de tenir compte des réalités. Il s’agit, bien au contraire, de regarder les réalités en face et de réagir de la seule façon qui vaille : Hollande se moque de nous parce que la France et son avenir sont les derniers de ses soucis, seule importe la consolidation de son parti par ses alliances avec les extrêmes-gauches.
Délivrons d’abord les plus naïfs d’un contresens. Ils affublent la notion de social-démocratie d’une acception fausse : la social-démocratie est d’essence marxiste et s’appuie sur une classe ouvrière organisée, ce qui explique la relation consubstantielle entre les syndicats et les partis sociaux-démocrates en Allemagne et en Scandinavie. Les révolutionnaires russes de 1917, mencheviks puis bolcheviks, étaient issus du Parti social-démocrate. L’erreur provient de ce que le SPD, le Parti social-démocrate allemand, a décidé, lors de son congrès tenu à Bad-Godesberg en 1959, d’abjurer la référence marxiste. Tout en gardant son nom.
Rien de tel en Suède où la social-démocratie s’est appuyée, jusque dans les années 1990, sur une dépense publique atteignant 70 % du PIB, financée par des prélèvements obligatoires faramineux, le tout dans le cadre d’une société extrêmement normée, à la limite du totalitarisme. Lorsque les pontes du Parti socialiste affirment haut et fort qu’il n’y a pas de tournant, je leur en donne acte volontiers : Hollande et ses sbires qui ruinent le contribuable tout en s’évertuant à museler ceux qui ne pensent pas comme eux, à interdire à peu près tout ce qui fait l’agrément de notre société, des voitures aux téléphones mobiles, tout en niant la différence entre hommes et femmes et en détruisant les fondements de notre civilisation, s’inscrivent dans la démarche social-démocrate, si ce n’est traditionnelle, à tout le moins originelle.
Que Hollande se proclame social-démocrate, grand bien lui fasse, ce n’est pas le souci de La Droite Libre et ne devrait pas être celui de l’UMP. La totalité des propos de Hollande depuis le 31 décembre s’inscrit dans ce qui fait sa marque de fabrique, la plus totale hypocrisie.
Il évoque un niveau insupportable d’impôts, la nécessité de réaliser des économies budgétaires, l’impératif de simplifier l’organisation administrative de la France. L’UMP et La Droite Libre seront entièrement d’accord pour la simple et bonne raison qu’elles tiennent ce discours depuis des années. Mais elles n’en donneront pas quitus pour autant à celui qui s’est évertué à faire point par point le contraire, avec une rare constance.
Inutile de s’étendre sur le matraquage fiscal. Hollande rétorque qu’il nous prend notre argent tout de suite, et pas qu’un peu, pour nous le rendre dans des proportions qui restent à déterminer dans deux, trois, quatre ans… ben voyons !
Réaliser des économies budgétaires. Les exemples fourmillent : l’instauration d’un jour de carence en cas d’arrêt de travail pour les fonctionnaires, mesure modeste prise par le gouvernement Fillon qui n’avait pas osé en instaurer trois comme c’est le cas pour les salariés du privé, avait entraîné une chute de l’absentéisme de 43 %. Supprimé ! Hollande va peut-être venir nous expliquer que ce n’était pas ainsi qu’il fallait procéder et qu’il va instaurer, lui, une demi-journée de quart de carence.
Hollande et ses affidés avaient manifesté pour empêcher l’instauration de la retraire à 62 ans. Il l’a rétablie à 60 ans sous prétexte de carrières longues. Il va lui falloir maintenant expliquer qu’il va instaurer la retraite à 60 ans plus 24 mois.
Il n’a pas eu plus urgent à faire, à part de nous imposer le mariage pour tous sauf pour lui, que d’abroger la hausse de la TVA programmée pour le 1er octobre 2012. Il a été contraint de la rétablir pour le 1er janvier 2014.
Pour écoper les dégâts qu’il a lui-même provoqués, Hollande nous fait miroiter des baisses de dépenses de 50 milliards d’euros sur trois ans. Il faut d’abord reconsidérer ce montant parce qu’il avait déjà parlé de 15 milliards d’euros d’économies en 2014. Ces 15 milliards sont donc intégrés dans les 50 qu’il prétend réaliser ; il n’en annonce, en réalité, que 35. Le problème avec les chiffres, c’est que comme disaient Henri Poincaré, puis Albert Einstein, « tout est relatif ». Qu’on parle de 35 milliards d’euros ou de 50, cela représente le total hallucinant de 0,6 ou 0,8 du PIB de la France sur trois ans. Et si l’on rapporte les substantielles économies promises par notre Normal national au gouffre abyssal de la dépense publique française, on arrive à 1 % de celle-ci ou, si l’on est généreux et qu’on prend aussi en compte les 15 milliards déjà annoncés, on arrive royalement à 1,47 %, toujours sur la période considérée. Et l’UMP devrait être embarrassée pour renvoyer Hollande dans les cordes ! Sacrebleu !
Quant à la nécessaire réforme du millefeuille territorial, la duplicité hollandiste mérite le Prix Nobel. Le rapport Attali, commandé par Nicolas Sarkozy dès les premiers jours de son quinquennat, avait fait des propositions solides et efficaces, parmi lesquelles la suppression des départements. La Droite Libre avait, à l’époque, regretté que sous la pression des élus locaux préoccupés de conserver leurs prébendes, le gouvernement renonçât à cette idée simple et efficace. Il n’en demeure pas moins que, dès 2010, le Parlement avait contourné une grande partie de l’obstacle et instauré un changement d’envergure qui devait prendre corps dans exactement deux mois.
Le conseiller territorial devait, concomitamment aux élections municipales de mars prochain, se substituer aux conseillers généraux élus en 2008 et 2011, conjointement aux conseillers régionaux élus en 2010. Tout à sa frénésie pathologique d’effacer le travail accompli au cours des cinq années qui ont précédé son élection, Hollande s’est empressé de tout abroger, de rétablir le nombre initial de conseillers généraux avec un mode de scrutin baroque, et de conseillers régionaux et de retarder les élections d’un an. Sarkozy avait, pour ainsi dire, supprimé les conseils généraux et lui vient nous dire aujourd’hui qu’il faut simplifier le millefeuille.
Il y a même plus grave : la loi de 2010, celle qui a créé le conseiller territorial, avait abrogé la clause de compétence générale par laquelle toutes les instances élues pouvaient travailler sur tous les dossiers qu’elles souhaitaient, redondances et gaspillages à l’appui. Elle a été rétablie par la majorité hollandiste en… décembre 2013. Et un mois après, l’autre nous fait son numéro. La malhonnêteté intellectuelle est forgée dans un culot en acier trempé.
À l’aune d’un tel désastre, il n’y a qu’une réponse à fournir. Non ! Hollande ne prend pas un virage par lequel il appliquerait une politique que ne renierait pas l’UMP. Il essaie, après avoir mis le pays à genou, de rafistoler ce qui peut l’être en rétablissant très partiellement quelques bonnes décisions qui avaient été prises avant lui.
Mais cela ne l’exonère de rien du tout, d’autant qu’il tente cet ultime bricolage en poursuivant une politique sans précédent de destruction des bases de notre société : qu’il s’agisse de la famille, de l’école, des libertés publiques, pas un jour ne se passe sans que le pilote de scooter casqué n’y porte atteinte. Une seule préoccupation pour lui : faire accepter par les ultra-gauchistes de sa majorité le contraire de ce qu’ils lui ont imposé depuis deux ans. L’ensemble en portant atteinte à l’image de la France en portant un costume de président beaucoup trop grand pour lui.